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Guinée : une soixantaine d’années d’indépendance dans l’errance politique

L’ancrage de la violence par sa banalisation, le communautarisme généralisé, la mauvaise gestion tout aussi souveraine, un espace politique plus verrouillé qu’il n’y parait et le désordre ambiant…tels sont les problèmes que notre second contributeur met en évidence à l’issue de son diagnostic de notre parcours commun de 61 ans.

Bilan de la situation guinéenne

Plusieurs décennies après la prise en main de son destin, le bilan politique, social et économique de la Guinée s’avère dérisoire en matière de développement par rapport aux attentes de ses citoyens qui considèrent que, eu égard aux immenses potentialités économiques de notre beau pays, « il n’est rien de plus illogique ». Ce contraste est si saisissant que nombre de Guinéens ont parfois avancé l’idée d’une malédiction divine, comme cause de notre retard par rapport à certains pays voisins, pour qui la nature est pourtant moins généreuse. Il convient de lever l’ambiguïté sur cette représentation mentale qui délègue la responsabilité de nos insuffisances à la transcendance. Dans ce cas, il n’est guère inintéressant de souligner que nul ne devrait désigner Dieu et/ou la France comme bouc-émissaire, responsable de notre retard. Bien au contraire, en citoyens responsables, il est de notre devoir d’assumer pleinement l’histoire politique de la Guinée en y faisant face.

De l’indépendance au Parti Unique : la Première République (1958-1984)

Le Non au Référendum du 28 septembre 1958 est un coup de théâtre qui a fait de la Guinée la première colonie française au Sud du Sahara à réclamer son indépendance à la Métropole. Depuis, notre pays s’est lancé à corps perdu dans une expérience politique exaltante au début et décevante par la tournure que prirent les événements.  La Guinée, qui inspirait beaucoup confiance et plein d’espoir à cette période, n’a guère pu contenir l’euphorie suscitée par l’indépendance qui réunissait déjà toutes les conditions d’une dérive de pouvoir, eu égard à l’emprise de l’Etat rhizome sur la société, incapable de s’émanciper des logiques communautaristes. C’est pourquoi les espoirs cédèrent très tôt la place à la désillusion totale ; car en donnant un coup d’accélérateur au pouvoir en place, l’agitation politique réussit du même coup à détourner l’histoire de la Guinée de ses fins objectives pour l’immerger dans un tourbillon de propagande révolutionnaire. Du fait des antécédents de la trajectoire politique de certains Etats postcoloniaux, l’histoire nous enseigne aujourd’hui que, pour le plus grand bien d’un peuple, la mission d’un leader nationaliste doit prendre fin aussitôt après avoir mené son pays à l’indépendance nationale. Dans le cas contraire, tels les exemples du Zimbabwe, de Cuba, de la Guinée, entre autres, son maintien à la tête de l’Etat conduit toujours au despotisme à force d’une tendance naturelle à la centralisation du pouvoir. A la différence des exemples précédents, aussitôt après sa libération de la gymnastique révolutionnaire, dans le sillage de la disparition de Mao, la Chine a rejoint le rang des grandes puissances économiques de la planète. On se souviendra que, quand la famine l’a frappée en 1976, le Cameroun a porté secours à la Chine, en contribuant à l’aide alimentaire. Aujourd’hui la situation socio-économique dans les deux pays est nettement différente. On peut également constater que, contrairement à l’exploit économique de la Chine, la Corée du Nord, son voisin immédiat, en dépit de la misère sociale dans laquelle vivote le peuple, continue toujours de déifier la famille des Kim.

L’accession de la Guinée à son indépendance représente certes une avancée historique importance mais, à l’opposé, elle a débouché sur un recul démocratique. En effet, l’avènement de cet acte historique a été possible grâce au ralliement à la cause nationale des partis de l’opposition. Or aussitôt après, ils ont été tous littéralement supprimés au nom de la consolidation de la Nation. Mais quelques années plus tard l’unanimisme, qui a accouché de l’indépendance, a cédé la place à la grève des enseignants de 1961-1962. A l’image de tous pays communistes, criant aux complots, la Révolution guinéenne a profité de cette crise pour dévorer, au fil des années et conformément à sa radicalisation, les plus valeureux fils du pays. En revanche, n’ont échappé aux purges cycliques que ceux qui, par anticipation, prirent la route de l’exil. Ainsi, progressivement la Guinée s’est-elle vidée de toute sa substance vitale. En lieu et place, effervescence révolutionnaire, endoctrinement idéologique, instauration de l’enseignement en langues nationales et travaux manuels à l’école, suppression du commerce privé, étatisation des entreprises, collectivisation agricole à l’image des kolkhozes et sovkhozes soviétiques, entre autres choses, se sont imposés comme modèle de développement. Pendant ce temps, la prééminence de l’idéologie révolutionnaire dans la prise des décisions d’ordre économique et social a été à la base d’improvisations contreproductives. Par exemple, jusqu’en 1960, la Guinée était le premier producteur mondial de bananes. C’est la nationalisation des plantations qui les a fait disparaître ; alors que, contrairement à notre pays, l’économie de la Côte d’Ivoire repose aujourd’hui encore essentiellement sur la production de café-cacao, cultures de plantation d’héritage colonial.

Par-delà la confiscation des libertés, la politique de mainmise de l’Etat sur tous les secteurs de la vie nationale menée pendant 26 ans a été désastreuse. Cet antécédent historique pèse encore de tout son poids sur la Guinée, sur les Guinéens et enfin sur le fonctionnement des institutions. Car la période post-coloniale instaure un ordre à vocation totalitaire doté d’un parti unique : le PDG. C’est dans ce contexte que le père de l’indépendance guinéenne disparaît en 1984, laissant derrière lui un pays en ruine. On peut en tirer deux leçons importantes : i) un pouvoir sans contre-pouvoir est un fauve en laisse ; ii) la première ressource de développement d’un pays est la ressource humaine ; car c’est l’esprit humain qui réfléchit, conçoit des projets de société puis les met en œuvre. Or c’est cette élite qui manque cruellement à la Guinée. Contrairement à la plupart des anciennes colonies françaises, la Guinée se singularise par une discontinuité entre l’élite formée pendant la période coloniale et celle d’après l’indépendance. Pourtant, jusque dans les années soixante, le Bénin et la Guinée étaient reconnus comme étant les deux pays qui comptaient une élite intellectuelle plus importante que toutes les autres colonies françaises à l’époque.

De la liberté au désordre : la Deuxième République (1984-1990)

A l’image du 02 octobre 1958, l’irruption sur la scène politique du CMRN en 1984 est accueillie en libérateur. L’ambiance est si euphorique que les Guinéens se laissèrent déborder par la situation, oubliant dans la foulée l’essentiel : poser le diagnostic de la situation. Or aucun pays au monde ne peut aspirer au développement en faisant fi de son passé, car porter le regard sur le passé permet de mieux se projeter dans l’avenir. Aujourd’hui encore le travail de mémoire n’a pas été fait, ce qui constitue une lacune historique qui pèse de tout son poids sur le devenir de la Guinée. Ainsi, la période de la transition appelée Deuxième République (1984-1990) s’amorce-t-elle avec l’avènement de la junte militaire au pouvoir. Le 22 décembre 1985, un discours-programme trace les grandes lignes de l’action gouvernementale : privatisation d’une grande partie des secteurs industriel et commercial, assainissement des finances nationales (monnaie, budget…). Entre autres mesures, la restructuration des transports et les réformes administratives. Sur le plan socio-culturel, on décide du retour à l’enseignement en français et de la création d’écoles privées. Sur le plan sanitaire, la rénovation d’hôpitaux et l’autorisation du libre exercice de la médecine privée sont mises en œuvre. Ces réformes amorcées après beaucoup de tâtonnements, n’ont pas connu l’issue heureuse attendue par les citoyens, même si elles ont eu le mérite d’améliorer la vie sociale. La Guinée, qui traîne derrière elle l’héritage d’une superstructure colossale, n’arrive pas à changer les habitudes de mauvaise gestion et de gaspillage des biens publics.

Des alternances non démocratiques : la Troisième République (1990-2010)

Au cours de la Troisième République intervient une restructuration du paysage politique avec la création de 47 partis politiques dont six seulement sont représentatifs. L’instauration de la démocratie est fortement entamée par le communautarisme politique qui prend appui sur le ressort ethnique. Le régime militaire se civilise en renforçant progressivement ses positions dans l’intolérance de la culture démocratique. A l’image de son prédécesseur, le pouvoir se consolide aux dépens de l’alternance démocratique. La maladie du Président aidant, le non renouvellement du Parlement, la constitution de clans autour de ses deux épouses, l’absence de l’Etat, créent, entre autres, les conditions d’une profonde détérioration de la situation. Ainsi, tout ce qui avait été construit, restructuré avec l’aide internationale avait-il fini par péricliter progressivement. Et surtout la collusion entre services publics et privés encouragée par la déliquescence et l’absence de toute morale achève de dépeindre ce sombre tableau. C’est dans ces conditions que, grèves consécutives, répressions sauvages, nomination d’un premier ministre, finissent par précipiter le président moribond de l’autre côté de la rive. Pendant ce temps, tel le retour d’une tradition, Capitaine survient à jeun qui cherchait aventure, mais la chemise manche courte qu’il a enfilée s’est troquée rapidement en robe longue trop ample pour lui. L’issue finale se veut sans commentaire !

La Guinée a raté une fois de plus la voie à suivre en 1993, dans la mesure où le CMRN devait céder le pouvoir aux civils. Or il en a été autrement pour plusieurs raisons dont, entre autres : les principaux leaders politiques férus de leur charisme international ont sous-estimé celui qui s’est emparé du pouvoir en 1984. Ils pensaient n’en faire qu’une bouchée. Cette situation rappelle le discours de Lansana Conté à leur adresse : « On botte les fesses » ! Le retour à un pouvoir civil aurait certainement permis au pays de mieux se reconstruire. Un autre raté se cristallise autour de la désillusion des « Guinéens de l’étranger », revenus massivement de leurs lieux d’exil pour s’investir dans la reconstruction du pays. Ces « Diaspos », comme on les appelait, représentaient une ressource humaine importante qui aurait pu apporter beaucoup de changements. Mais par méfiance, le gouvernement en place n’a intégré que quelques rares personnes. Ces privilégiés très minoritaires, ne pouvant tenir tête au système, s’y sont adaptés et ont participé à la dilapidation des biens au même titre que les locaux. Découragés, les autres se réfugièrent dans un mutisme béat ou reprirent le chemin de l’exil.

De la conquête au mode d’exercice du pouvoir par Alpha Condé

La voie s’étant libérée progressivement avec la disparition de certains hommes clés de l’arène politique (Siradiou Diallo, Lansana Conté, Ba Mamadou), notre Professeur-bien-aimé réussit en 2010 par un tour de passe-passe verbal et de manipulation à se hisser au sommet de l’Etat. En coup de maître, il redonne aux vieux démons de la Guinée, que sont l’ethno-stratégie et la barbarie, beaucoup plus de vigueur. Placé tel un pantin à la tête du pouvoir, il n’a pas non plus eu la main libre pour gouverner ; car les ténors du RPG veillent à ce que leurs intérêts ne soient en aucun cas entravés par une quelconque réforme. Cette prise de position rappelle, on ne peut plus clairement, la bourgeoisie administrative qui s’est constituée progressivement au cœur de l’Etat avec l’appareil du PDG sous la Première République ou celle du PUP qui a été prise de cours par les événements, en voulant absolument préserver le pouvoir. Ainsi, n’ont-ils jamais songé à organiser les législatives ou à déclarer l’incapacité du président de gouverner le pays jusqu’à sa disparition. Dans les conditions sus mentionnées, il est tout à fait logique que, désordre, gestion calamiteuse des ressources et des affaires de l’Etat se généralisent, tout au long de notre histoire politique, dans l’indifférence totale des gouvernants, acteurs de la situation. Tous ces aspects reposent sur des antécédents historiques dont, entre autres, l’instauration des logiques de cooptation des élites fondées sur la patrimonialisation du pouvoir.

Maître dans l’art du double jeu, Alpha Condé, nouveau président, manipule les acteurs politiques guinéens comme des adolescents. D’ailleurs considère-t-il les Guinéens comme des moutons de Panurge. C’est ainsi que l’organisation des législatives n’a pas suivi les présidentielles. Bien au contraire, notre Professeur-bien-aimé a pris le temps d’asseoir avant tout son pouvoir en foulant aux pieds la constitution. Malgré les manifestations et les bains de sang, le Président n’a organisé un semblant d’élection qu’à  la mi-mandat. Ainsi, s’est-il assigné facilement le second KO. C’est en suivant la même logique, qu’il est parvenu à réunir autour de lui tous les gueulards, nommés à des postes fictifs afin qu’ils ne soient pas gênants et de la même manière il a également recyclé les anciens ministres de son prédécesseur, ceux-là même qui se sont livrés à la gabegie ayant causé la ruine du pays. Notre Professeur-national a, par ailleurs, le don particulier de tourner constamment en dérision l’opposition ; c’est ainsi qu’il a rallié à sa cause même ceux qui étaient plus acharnés contre lui. La pléthore de ministres laisse supposer qu’il n’a jamais appris qu’un Etat doit faire des économies en diminuant son train de vie. Mais une telle mesure n’est guère envisageable dans une République bananière comme la nôtre. Tout comme ses deux prédécesseurs, au lieu de songer à l’alternance démocratique, la tendance est plutôt à la pérennisation du pouvoir. Or le pouvoir use l’homme. C’est pour cette raison que toute pérennité à la tête du pouvoir participe d’un immobilisme social et économique. En s’accrochant à leurs postes de responsabilités, les hauts fonctionnaires finissent par imposer une logique de patronage ; développant dans la foulée routine et anachronisme ; alors qu’il suffit d’un renouvellement du parc pour apporter un peu plus de d’oxygène aux institutions.

Le moins que l’on puisse dire est que : tout se passe comme si, à toutes les étapes de son histoire politique, la Guinée, à défaut d’emprunter la bonne voie à suivre, s’était enfoncée progressivement dans l’abîme. En effet, aussitôt après le Référendum du 28 septembre 1958, des hommes politisés prennent en main la destinée du pays, férus de leur jeunesse et fiers d’avoir chassé le colon blanc, ils colonisent à leur tour le peuple. Bien que la politique officielle soit de prôner l’unité de la Nation et du peuple de Guinée et que le racisme et le tribalisme soient en permanence dénoncés, les caractéristiques ethniques demeurent vivaces. Ainsi, notre pays n’a jamais réussi à consolider la Nation. De tous temps, le mode d’affectation ainsi que celui de l’attribution des postes a reposé sur la cooptation et non les compétences. Dans ces conditions, la faillite du Parti Unique dans sa tentative de construction en Guinée d’une conscience nationale n’est plus à démontrer.

Qu’est-ce qui a prévalu en Guinée de la conquête coloniale à nos jours

Le tracé des frontières de la Guinée ayant reposé essentiellement sur le compromis entre puissances conquérantes, en 1946 déjà, la formation des partis politiques s’appuie sur des considérations tribales ; c’est ainsi que la lutte politique a emprunté la voie de la violence qui s’est progressivement banalisée jusqu’à aujourd’hui. Aussi, tout au long de l’histoire politique de la Guinée, dans le processus de conquête tout comme dans celui de l’exercice du pouvoir, tous les dirigeants, qui se sont succédé à la tête de l’Etat, ont-ils activé les idéologèmes ethniques et utilisé la violence pour s’imposer. La banalisation de cette violence et la rémanence ethnique représentent un handicap important à surmonter pour le développement socio-économique de la Guinée. En effet, il n’est guère important d’insister sur la nécessité de préserver la paix sociale dans un pays et d’y aiguiser une conscience nationale si l’on veut assurer son développement. On peut résumer la situation qui prévaut en Guinée à quelques maux essentiels :

  1. La barbarie résulte de la banalisation de la violence dont le retour cyclique en fait un phénomène de société ; tout se passe aujourd’hui comme si les Guinéens s’y s’étaient accommodés par la simple habitude de bavures qui ponctuent leur vie quotidienne ;
  2.  Le tribalisme dont la rémanence couvre toutes les étapes de l’histoire politique du pays s’est amplifiée avec l’arrivée d’Alpha Condé au sommet de l’Etat ; c’est certainement une de ses armes favorites de conquête et d’exercice pouvoir.
  3.  La mauvaise gestion, qui s’est enracinée au cœur du pouvoir, repose sur l’idée qu’exercer une quelconque responsabilité est l’occasion de s’enrichir ; les mœurs politiques et administratives en sont profondément affectées. Dans ce contexte, tous ceux qui sont promus à un quelconque poste de responsabilité ne roulent que pour leurs intérêts personnels et égoïstes. Parfois certains, du fait de leur faible niveau de connaissances, n’ont même pas conscience du poids de la responsabilité qui pèse sur leurs épaules ;
  4. L’emprise du PDG, puis du PUP et enfin du RPG, partis au pouvoir de 1958 à 2019, a participé à une modification en profondeur de l’équilibre socioculturel du pays, dont les conséquences sont, entre autres, le travestissement des conduites, habitudes et représentations collectives. Il en résulte que dispersion et individualisme affectent la société dans son ensemble et modifient en profondeur les comportements humains. C’est ainsi que la couche intellectuelle affecte une indifférence totale face aux problèmes du pays. Quasiment absente de la scène politique, sauf pour ceux qui se livrent à la propagande du pouvoir en place en vue de sauvegarder leur poste de responsabilité, ils se sont réfugiés dans un mutisme coupable, sinon une indifférence qui les empêche de prendre en main les affaires et de les conduire efficacement. Les uns se sont adaptés au système en se livrant à une extraversion économique, tandis que d’autres se sont réfugiés dans un mutisme total, détournant leur regard devant les problèmes sociaux, ils ne s’en occupent pas plus que de leurs affaires personnelles.
  5.  Le désordre, dans tous les secteurs de la vie sociale, qui sévit en Guinée est indescriptible. Ce phénomène s’est tellement généralisé, qu’il donne l’impression d’une absence compète de l’Etat. Dans ces conditions, le réflexe de survie amène chaque guinéen à participer, d’une certaine manière, à l’autorégulation du désordre.

La résolution de ces multiples problèmes, entre autres, représente certes un travail colossal, surtout quand on considère que, du fait de leur enracinement dans le tissu social, les habitudes ont la vie dure. Mais, si colossaux soient-ils, les Guinéens doivent se mobiliser pour y faire face en vue de forger une autre histoire – la leur- conformément à leurs aspirations profondes. Ainsi, auront-ils réussi à s’émanciper de tout déterminisme qui anesthésie durablement les consciences.

 

Alpha Ousmane Barry

Professeur des Universités

Réseau Discours d’Afrique

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