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Rejet de la candidature d’Hama Amadou à la présidentielle au Niger : une décision politique ?

La Cour constitutionnelle du Niger a annoncé vendredi 13 novembre la liste des candidatures validées pour l’élection présidentielle dont le premier tour doit avoir lieu le 27 décembre. Sans surprise, l’opposant Hama Amadou n’y figure pas.

L’issue ne faisait que peu de doutes. Certes, samedi 7 novembre, dans les travées du stade Seyni Kountché de Niamey, alors qu’Hama Amadou tenait un impressionnant meeting, ses partisans faisaient encore mine d’espérer.  Mais cela n’aura pas suffi : sa candidature pour la présidentielle a été rejetée par la Cour constitutionnelle.

« La Cour déclare inéligible à l’élection présidentielle Hama Amadou du Moden Fa Lumana », a annoncé vendredi 13 novembre le président de la Cour, Bouba Mahamane. Celui-ci, qui a fait l’annonce lors d’une audience au siège de son institution à Niamey, n’a pas explicité la raison de ce rejet.

Le couperet de l’article 8

L’explication est cependant connue de tous au Niger. Hama Amadou, ancien Premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale, avait été condamné en 2017 à un an de prison dans une affaire de « supposition d’enfants », dite des « bébés importés ». Une condamnation que l’intéressé a toujours qualifiée de politique.

Si Hama Amadou avait bénéficié en mars d’une grâce présidentielle alors qu’il purgeait sa peine, il n’en restait pas moins, selon la Cour constitutionnelle, concerné par l’article 8 de l’actuel code électoral. Or, celui-ci stipule que toute personne condamnée à au moins un an de prison ne peut être autorisée à se présenter à une élection.

Les avocats d’Hama Amadou ont ces derniers mois tout tenté pour échapper à l’invalidation de la candidature. Ils ont notamment mis en avant le fait que leur client n’aurait pas été déchu de ses droits civils et politiques par la justice. Une partie de l’opposition réclamait quant à elle une modification du code électoral. Mais la majorité présidentielle est restée sourde à leur revendication et la Cour a choisi de rejeter les arguments de l’opposant.

« Une décision politique »

« La Cour n’a fait que lire l’article 8. On ne peut pas modifier ou interpréter une loi en fonction de telle ou telle personne », se réjouit un cadre du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS, au pouvoir). « C’est une décision politique à laquelle nous nous attendions », déplore un proche d’Hama Amadou. « La Cour a prouvé qu’elle n’était pas indépendante et qu’elle était sous l’influence du PNDS », ajoute notre source.

Hama Amadou, qui avait ces dernières semaines débuté une campagne remarquée pour la présidence, n’a pas encore officiellement réagi à son éviction, même si plusieurs faux messages lui étant attribués circulent sur les réseaux sociaux. Selon nos informations, l’ancien Premier ministre a quitté le Niger pour le Nigeria dans la matinée du vendredi 13 novembre, avant même la décision de la Cour.

Quid de la suite ?

À Niamey, sa prochaine première prise de parole est très attendue, à la fois par ses militants, ses alliés et ses adversaires. Faisant partie de la coalition de l’opposition Cap21 – qui regroupe les principaux opposants et qu’il espérait mener lui-même à la victoire -, Hama Amadou doit désormais choisir s’il soutient ou non un autre candidat.

« Cela fait des mois que tous se demandent ce qu’il fera si son dossier n’est pas validé », explique un membre de la coalition. « On attend. Soit il conteste la décision et engage un rapport de force avec le PNDS pour continuer de jouer sa carte personnelle, soit il fait campagne avec l’opposition pour quelqu’un d’autre », détaille un autre opposant.

« Il a fait monter la pression ces dernières semaines pour effrayer la Cour, mais cela n’a pas fonctionné. Il n’a pas les moyens d’empêcher l’élection de se tenir », croit savoir notre source au PNDS. « Il y a un risque de tensions. Hama Amadou peut chercher à lancer un bras-de-fer avec le pouvoir, notamment à Niamey, où son parti est très présent, mais c’est un jeu dangereux », analyse cependant un diplomate en poste au Niger.

Trente candidatures validées

Ce même 13 novembre, la Cour constitutionnelle a également rejeté onze autres candidats, lesquels n’avaient pour la plupart pas pu prouver le bon versement de la caution de 25 millions de francs CFA requise pour chaque dossier. La Cour a en revanche validé trente candidatures.

L’ancien ministre de l’Intérieur Mohamed Bazoum (PNDS) – dont l’éligibilité était contestée par ses adversaires au motif qu’il ne pourrait pas prouvé être né au Niger de parents nigériens – fait figure de favori. Salou Djibo, Seïni Oumarou, Mahamane Ousmane, Ibrahim Yacouba et Albadé Abouba seront ses principaux concurrents.

La liste complète des candidatures :

  1. Abdallah Souleymane, du parti « Niger En Avant » (NIGERENA) ;
  2. Abdoul Kadri Oumarou Alfa, du Groupement GAYYA ZABBE ;
  3. Albadé Abouba, du Mouvement Patriotique pour la République (MPR-Jamhuriya) ;
  4. Amadou Boubacar Cissé, de l’Union pour la Démocratie et la République (UDR TABBAT) ;
  5. Amadou Issoufou Saïdou, Candidat Indépendant ;
  6. Amadou Ousmane, du parti ADEN Karkara ;
  7. Djibril Baré Maïnassara, de l’Union des Forces Populaires pour la Démocratie et le Progrès (UDFP SAWABA) ;
  8. Hamidou Mamadou Abdou, du Rassemblement National Africain (RANAA) ;
  9. Hassane Barazé Moussa, de l’Alliance Nigérienne pour la Démocratie et le Progrès (ANDP-Zaman Lahiya);
  10. Ibrahim Gado, du Conseil Républicain pour le Progrès et la Démocratie (CRPD-SULHU) ;
  11. Ibrahim Yacouba, du Mouvement Patriotique Nigérien (MPN Kishin Kassa) ;
  12. Idi Ango Ousmane, de l’Alliance pour la Démocratie et la République (ADR-Mahita) ;
  13. Idrissa Issoufou, du Mouvement Citoyen pour le Développement (MCD, Jarumin Talakawa) ;
  14. Intinicar Alhassane, du Parti Nigérien pour la Paix et le Développement (PNPD AKAL KASSA)
  15. Ismael Oumarou Idé, du FANN-Niger Kama Kanka
  16. Kané Kadaouré Habibou, de Synergie des Démocrates pour la République (SDR-Sabuwa) ;
  17. Mahaman Hamissou Moumouni, du Parti pour la Justice et le Développement (PJD-Hakika);
  18. Mahamane Ousmane, du Renouveau Démocratique et Républicain (RDR Tchanji) ;
  19. Mamadou Doulla Talata, de RSP A’Adili ;
  20. Bazoum Mohamed, du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (PNDS Tarayya);
  21. Mounkaila Issa, du Rassemblement Nigérien pour la Démocratie et la Paix (RNDP- Aneima Bani zoumbou) ;
  22. Moustapha Mamadou Moustapha, de PRPN Haskin Gari ;
  23. Nayoussa Nassirou, de CDPS Cigaban Kassa ;
  24. Omar Hamidou Tchiana, de l’Alliance des Mouvements pour l’Emergence du Niger (AMEN-AMIN);
  25. Oumarou Abdourahamane, de l’UNPP Incin Africa ;
  26. Oumarou Malam Alma, du Rassemblement pour la Paix et le Progrès (RPP-Farilla) ;
  27. Sagbo Adolphe, de PS Imani ;
  28. Salou Djibo, du parti “Paix, Justice, Progrès (PJP-Génération Doubara)
  29. Seini Oumarou, du Mouvement National pour la Société de Développement (MNSD-Nassara) ;
  30. Souleymane Garba, de PNC Mulura.

 

Par Jeune Afrique

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