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Guinée: Présidentielle 2020, le compte à rebours est enclenché

Chronique. Wikileaks peut sûrement avoir eu accès aux fuites d’information avant moi. Je présume donc qu’il ne m’en voudra pas si j’annonce – avant ou après lui – que dans les jours et semaines à venir, ‘‘le président guinéen Alpha Condé donnera le feu vert à la Commission électorale nationale indépendante (CENI) pour annoncer l’organisation du scrutin présidentiel à un seul tour au mois d’octobre prochain’’.

C’est une information authentique. Mais il faut y mettre un ‘‘SI’’ avec de grandes lettres majuscules. Bien évidemment. Car il suffit que les opposants à son régime et leur chef de file Cellou Dalein Diallo restreignent tant soit peu sa marge de manœuvre, pour qu’Alpha Condé, en vieux renard politique candidat à sa propre succession, trouve l’astuce pour changer immédiatement ou maintenir vaille que vaille le chronogramme et remettre en sa faveur.

Il n’est pas exclu qu’entretemps Alpha Condé se donne les gros moyens de secouer l’arbre de l’opposition sur laquelle se sont embranchés certains de ses anciens collaborateurs, à savoir : Sidya Touré qui fut son Haut représentant, Lansana Kouyaté son ancien Vice-président de l’Alliance électorale Arc-en-ciel et Dr Ousmane Kaba son ancien conseiller économique.

La gravité de la pandémie du coronavirus et le nombre de morts, de blessés, de sinistrés enregistrés pendant les manifestations du Front national pour la défense de la constitution (FNDC) n’ont pas empêché la tenue du double scrutin législatif et référendaire tel que programmé le 22 mars 2020. Il est évident que ‘‘SI’’ Alpha Condé tient à son rendez-vous d’octobre, il aura lieu. Alpha Condé va dérouler subtilement son agenda politique, en utilisant, bien sûr, le terrain qu’il maitrise, la tactique qui est la sienne et les leviers acquis à sa cause, pour arriver à ses fins.

S’il y tient, alors qu’il pleuve ou qu’il neige, rien, aucun événement, aucune manifestation de l’opposition ou du FNDC, ne l’empêchera de briguer un mandat de 6 ans.

S’il s’y accroche, le tapis lui sera déroulé. L’environnement s’y prêtera aussi puisque les Médecins Cubains sont là. Les soutiens de la Russie, de la Turquie et la Chine ne manquent pas à l’appel. L’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSS) est cœur de la riposte contre la Covid-19. Si tout se passe bien, la Guinée va vaincre la pandémie. Dans un délai de deux mois, soit 60 jours, … toute manifestation, rassemblement ou encore contestation politique, demeure interdite.

Le Ministre d’Etat, Ministre chargé des Relations avec les Institutions Républicaine, ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Mohamed Fofana, a été on ne peut plus clair sur les déclarations de l’opposition, les observations de la société civile et les prises de position du Barreau de Guinée autour du contenu de la constitution issue du référendum du 22 mars 2020. Il a déclaré officiellement que la promulgation du texte constitutionnel est intervenue par décret D/2020/073/PRG/SGG du 6 avril 2020 et publié au Journal officiel de la République du 14 avril 2020. C’est fort de cette légitimité constitutionnelle que ce texte est applicable et opposable à tous. Point barre.

Ce qui est dit est dit. Cette déclaration du ministre ne suffit pas pour clore le débat autour de cette question juridique à quelques mois des élections présidentielles. Toutefois, elle éclaire pour qui le veut la voie que suit le chef de l’Etat et son gouvernement.

Comprenne qui pourra. La stabilité du pays risque d’être fortement ébranlée par les réactions qui pourraient résulter de cette situation de bras de fer entre partisans et opposants de la nouvelle constitution.

Sans illusions aucune, voici venu le moment propice pour les intellectuels guinéens de sortir de leur réserve pour dire la vérité – comme il le faut – au lieu d’assister en spectateur cynique aux conséquences catastrophiques qui pourraient en découler.

Certains diront à juste raison que ‘‘les grands principes respectent la morale et le droit’’. Indiscutablement. ‘‘Aucune riposte autre que le respect ne peut et ne doit être envisagé comme opération de secours’’.

D’autres renchériront, que c’est justement ‘‘la seule la volonté du peuple qu’il faut appliquer sans changement susceptible de provoquer un chaos qui n’arrangera ni les guinéens ni les amis de la Guinée’’.

En définitive, tous aboutiront à la conclusion suivante : ‘‘le jugement de l’histoire sera impitoyable si les juges, les religieux et les tenants du pouvoir temporel ne pensent qu’à leur nombril tout en méprisant le Peuple qui représente pourtant la souveraineté’’. CQFD.

Ibrahima Diallo
Journaliste/ Écrivain

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