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Cette vieille légende autour des bébés qui naissent à bord d’avions a la peau dure…

Dans un vol de Turkish Airlines entre Conakry et Ouagadougou, un bébé prématuré naît. La légende veut que les bébés qui naissent à bord d’avions bénéficient de voyages gratuits tout au long de leur vie. Malheureusement, selon le site Slate, rien de tout cela n’est vrai. Il ne s’agit là que d’une légende urbaine. Mediaguinee vous propose un article du Slate qui répond à toutes les questions liées aux naissances en plein vol…
Que se passe-t-il quand un enfant naît en plein vol?
Nationalité, lieu et date de naissance, billets gratuits à vie ou pas…
Une fillette est née dans un vol Iberia entre Malaba (Guinée Equatoriale) et Madrid (Espagne), dans la matinée du 3 juin, comme l’a signalé la compagnie dans un communiqué. Comment une naissance dans un avion est-elle possible? Quelle est la nationalité de l’enfant? A-t-il le droit à une relation privilégiée avec la compagnie aérienne à bord de laquelle il est né? FAQ de l’accouchement dans les airs.
Est-ce que naître en plein vol donne le droit à des réductions ou des avantages?
Grosse déception: il n’y aura pas de billets gratuits à vie pour le bébé Iberia du 3 juin. La porte-parole du groupe aérien explique que c’est une «légende urbaine».
En revanche, sur les cinq enfants nés à bord d’un vol Iberia, l’une d’entre elles a tout de même eu droit à quelques privilèges. Née il y a 43 ans, «Loreto», qui doit son nom à la sainte patronne des aviateurs, a contacté Iberia quand ils ont ouvert la page Facebook Iberia Airlines. Leur ayant rappelé sa naissance à bord d’un vol à destination de la Havane… elle aurait eu droit à «quelques cadeaux» de la part de la compagnie, qui refuse de donner plus de détails.
Air France n’offre pas de billets gratuits, mais selon son porte-parole, la compagnie sait «avoir le geste approprié pour féliciter la famille»: une «bonne bouteille» pour les parents n’est pas exclue. Autre mythe brisé par l’entreprise: le commandant de bord ne devient pas automatiquement le parrain du nouveau-né.
Quant à British Airways, ils ne garantissent pas non plus de statut particulier aux bébés qu’ils voient naître à bord de leurs avions. «Dans les années 1950, c’était différent, affirme un porte-parole, mais aujourd’hui aucune ligne aérienne n’encouragera les naissances à bord d’un appareil.» American Airlines confirme: le bébé «a déjà droit à un vol gratuit, jusqu’à l’atterrissage», nous a fait remarquer en plaisantant un porte-parole de la compagnie. A bon entendeur.
D’autres moyens de transport se montrent plus généreux. C’est le cas du métro de San Francisco (BART): un bébé né sur la ligne en juillet 1996 a ainsi obtenu le droit de voyager gratuitement à vie sur tout le réseau.
Est-ce qu’une femme sur le point d’accoucher a le droit de prendre l’avion?
Selon la porte-parole d’Iberia, rien n’interdit de prendre l’avion à une femme sur le point d’accoucher, mais cela lui est fortement déconseillé. Il s’agit d’éviter les accouchements en plein vol, qui «pourraient mettre la santé de la mère et de l’enfant en danger». Selon la compagnie, il y a «dû y avoir des raisons spéciales qui expliquent le fait que cette femme ait été à bord d’un avion de la compagnie».
La fillette née le 3 juin a eu de la chance: dans le vol où elle a vu le jour, se trouvaient une sage-femme, un pédiatre et un médecin, selon le communiqué de la compagnie. Il n’y a «même pas eu à détourner l’avion pour atterrir en catastrophe, ajoute la porte-parole d’Iberia, car l’accouchement s’est fait très rapidement et sans problème.»
Sur son site Internet, Air France n’interdit pas non plus aux femmes enceintes de voyager: «Vous attendez un heureux événement? Cela ne vous empêche pas de voyager!» peut-on lire sur une page dédiée aux femmes enceintes.Selon la compagnie, les futures mamans n’ont même pas besoin d’avoir un certificat médical avant de monter à bord. Il leur est seulement recommandé de demander conseil auprès de leur médecin avant d’effectuer leur voyage.
Air France leur propose ensuite une série de conseils pour passer un vol agréable. On notera que le dernier des conseils est tout de même celui d’«éviter de voyager au cours du dernier mois de grossesse, ainsi que durant les 7 jours qui suivent votre accouchement». Un simple conseil, pas une interdiction.
En revanche, British Airways n’autorise pas les femmes dans leur derniers mois de grossesse à voyager dans ses avions, sauf lettre de leur médecin l’autorisant spécifiquement, et expliquant la nécessité du déplacement le cas échéant, comme ils le spécifient sur leur site. La compagnie assure pourtant avoir un personnel «parfaitement entraîné» pour les cas d’accouchement, si la situation se présentait.
Même politique chez Alitalia: les femmes peuvent voyager jusqu’à leur huitième mois de grossesse, mais pour les quatre dernières semaines, elles sont obligées d’avoir un certificat médical. En outre, toute femme enceinte doit remplir un formulaire d’information médicale, où elle déclare ne pas avoir besoin d’un accompagnateur. A dix jours de la date d’accouchement, American Airlines demande également une autorisation médicale.
Quelle est la nationalité d’un bébé qui naît à bord d’un avion?
La nationalité fait l’objet de traités internationaux. Selon l’article 3 de la Convention sur la réduction des cas d’apatridie [PDF], un enfant né à bord d’un bateau ou d’un avion aura la nationalité du pays auquel est enregistré l’appareil: «Aux fins de déterminer les obligations des Etats contractants, dans le cadre de la présente Convention, la naissance à bord d’un navire ou d’un aéronef sera réputée survenue sur le territoire de l’Etat dont le navire bat pavillon ou dans lequel l’aéronef est immatriculé.» Ce texte ne concerne que 37 pays. La France l’a signé sans le ratifier.
Le ministère de la Justice espagnol, duquel dépend la naissance du vol Iberia, nous a fait savoir que «selon le droit international, l’avion est considéré comme une extension du territoire». De toute façon, en Espagne le droit du sang est également en vigueur (article 17 du Code civil espagnol). La mère de l’enfant étant espagnole, il a de toute façon la nationalité ibère. C’est surtout la nationalité des parents qui est privilégiée, pour la France comme pour l’Espagne.
En droit américain, le 14e amendement à la constitution relatif à la citoyenneté par le droit du sol s’applique aux avions survolant le territoire des États-Unis. Pour avoir la nationalité américaine, si les parents ne l’ont pas eux-mêmes, il faut faire une demande spécifique à l’Etat américain. En revanche, un appareil immatriculé aux États-Unis situé en dehors de l’espace aérien américain n’est pas considéré comme faisant partie du territoire national. Un enfant né dans un tel appareil ne pourra pas prétendre à la citoyenneté américaine en invoquant le droit du sol.
En 2006, une Égyptienne a accouché d’une petite fille en plein vol Londres-Boston. Selon la chaîne télévisée canadienne CTV, elle aurait obtenu la nationalité… canadienne, sous prétexte qu’au moment de l’accouchement, l’avion survolait le Canada.
Quel est le lieu de naissance inscrit sur sa carte d’identité ou son certificat de naissance?
Pour la petite fille du vol Malaba-Madrid, ce sera Madrid. Selon la loi d’état civil espagnole, le lieu de naissance d’un enfant né dans un avion est celui de l’arrivée du vol. L’article 16.1de cette loi affirme que «le Registre compétent pour l’inscription de l’état civil d’un enfant né au cours d’un voyage sera celui dans lequel celui-ci se termine».
Ce n’est pas aussi clair en France. Le code civil envisage l’enregistrement des naissances survenues en mer (article 59) mais il n’a pas été complété pour prendre en compte les naissances à bord d’avions, de trains ou de véhicules automobiles. En droit suisse, la naissance doit être enregistrée par l’officier de l’état civil dans l’arrondissement duquel la mère a quitté l’avion (ordonnance, 22 janv. 1960 sur les droits et devoirs des commandants d’aéronefs, art. 18) ou le véhicule pendant la course duquel la naissance est intervenue (ordonnance, 28 avr. 2004 sur l’état civil, art. 20).
Selon l’encyclopédie du Jurisclasseur, on préconise une solution similaire en France: la déclaration de naissance de l’enfant né au cours d’un voyage terrestre ou aérien se fait, en principe, là où l’accouchée a interrompu son voyage. Une naissance peut ainsi être enregistrée en France alors qu’elle est survenue avant l’entrée de la mère sur le territoire français. Ces précisions ne s’appliquent pourtant qu’à la déclaration d’état civil en non pas au lieu de naissance.
Pour l’avocate Nathalie Guyot, spécialisée en droit de la nationalité, le lieu de naissance s’obtient avec les coordonnées géographiques du lieu survolé au moment de la naissance. Une information confirmée par la porte-parole d’Air France, qui affirme que le commandant de bord est l’officier d’état civil chargé de noter l’heure de naissance, et les coordonnées de l’avion au moment de l’accouchement.
Qu’en est-il de l’heure de naissance, en cas de décalage horaire?
Iberia a communiqué l’heure espagnole pour la naissance de l’enfant: la fillette est donc née à 3h30 du matin.
L’explication bonus
Et en cas de décès? Un homme est mort durant son voyage depuis l’île de la Réunion jusqu’à Paris-Orly: «Pour l’heure, vu le décalage horaire, nous ne savions pas trop quoi inscrire, explique-t-on à la mairie de Paray-Vieille-Poste, dont l’aéroport Orly dépend. Finalement, nous avons indiqué 23h GMT. Pour le lieu de décès, nous avons inscrit « durant son transport de l’île de la Réunion à Paris Orly ».

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