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LE SECTEUR DES RESSOURCES NATURELLES EN AFRIQUE SE CARACTÉRISE PAR UNE LÉGISLATION RIGOUREUSE, MAIS INSUFFISAMMENT MISE EN ŒUVRE

ACCRA et LONDRES, le 15 avril 2019 – Les pays d’Afrique subsaharienne, une région riche en ressources naturelles, peinent à pleinement tirer profit de leurs vastes ressources pétrolières et minières en raison de « lacunes dans la mise en œuvre » des lois régissant les industries extractives et du décalage avec les pratiques réelles qui en résulte.

Une analyse du Natural Resource Governance Institute portant sur les industries extractives de 28 pays d’Afrique subsaharienne révèle que tous, à l’exception de deux — le Botswana et la Zambie — n’appliquent pas les normes prescrites par leur réglementation. Se fondant sur les données de l’Indice de gouvernance des ressources, les chercheurs ont constaté qu’à cet égard la région enregistre la plus mauvaise performance au monde.

« Si les pays d’Afrique subsaharienne pouvaient combler les “lacunes dans la mise en œuvre” et pleinement appliquer leur propre réglementation, ils pourraient tirer des revenus plus importants de leurs ressources naturelles. Ils pourraient également mieux lutter contre les incidences négatives sur le plan humain et environnemental des activités d’extraction », explique Evelyne Tsagué, codirectrice pour l’Afrique au sein du Natural Resource Governance Institute.

L’Afrique est riche en ressources naturelles et représente 30 % des réserves mondiales en pétrole, en gaz et en minéraux. Plus de la moitié des exportations de nombreux pays en Afrique subsaharienne provient des ressources naturelles — voire 90 % dans le cas des pays les plus dépendants au pétrole. Les réserves minérales constituent une large part des recettes gouvernementales dans la région et pourraient encore gagner en importance dans les pays où des découvertes récentes ont été réalisées, par exemple les gisements de pétrole et de gaz en Ouganda et en Tanzanie ou les larges réserves  de minéraux stratégiques tel que le cobalt en République démocratique du Congo.

Les défis les plus importants en termes de mise en œuvre auxquels sont confrontées les pays riches en ressources de l’Afrique subsaharienne sont l’application des exigences légales en matière de transfert des recettes perçues de l’exploitation du pétrole, du gaz et des mines vers les collectivités locales, et la publication d’informations relatives aux impacts sociaux et environnementaux. La moitié des 28 pays étudiés ne publie pas les évaluations d’impact social et environnemental, même si la réglementation l’exige dans bon nombre de cas.

Pour Evelyne Tsagué, « la confiance portée au gouvernement et aux entreprises s’érode lorsque les réformes juridiques ne sont pas appliquées et que les citoyens ne sont pas informés. Remédier aux “lacunes dans la mise en œuvre” va dans l’intérêt de tous, car à terme cela permet aux pays de tirer profit des avantages que devrait leur procurer leur richesse en minéraux ».

Mais les cycles d’expansion et de ralentissement du marché des matières premières ont alimenté les dépenses publiques dans les pays africains riches en ressources, entraînant des déficits budgétaires et une importante dette publique. De nombreux pays disposant de règles fiscales visant à stabiliser les finances publiques ne les appliquent pas, ce qui soulève la question de savoir si le gouvernement a mis en place des mécanismes de suivi adaptés, ou si ces règles étaient pertinentes.

L’Afrique subsaharienne est à la traîne d’autres parties du monde en matière de gouvernance des entreprises minières et pétrolières d’État et des fonds de ressources naturelles, qui gèrent des milliards de dollars de recettes provenant des ressources naturelles dans des pays tels que l’Angola, le Gabon et le Nigéria. Les gouvernements ont tendance à ne pas respecter les règles relatives à la gestion des actifs détenus par les fonds de ressources naturelles ou à la divulgation des conflits d’intérêts, en particulier lorsque la corruption est mal contrôlée — ce qui est le cas dans la plupart des pays examinés.

« Renforcer les capacités et donner sa place à une surveillance indépendante sont deux aspects essentiels de la responsabilisation des institutions gouvernementales des pays riches en ressources. Les organismes officiels d’audit et les acteurs non étatiques tels que les médias jouent un rôle important en la matière », estime Evelyne Tsagué.

Avec le soutien de la Vision du Régime Minier de l’Afrique et de l’Initiative pour la transparence des industries extractives, les pays d’Afrique subsaharienne ont largement réformé et modernisé les lois régissant les industries extractives, et d’autres réformes sont en cours dans l’ensemble de la région. Les cadres juridiques qui en résultent prévoient des règles en matière de transparence et de responsabilité plus rigoureuses que dans la plupart des autres régions du monde à l’heure actuelle, quoique leur application fait défaut.

« Même si cela n’est pas une surprise, il est décevant de constater que plus la réforme est récente, plus les lacunes dans la mise en œuvre sont importantes. Cela illustre le fait que si les réformes juridiques font les grands titres, en fin de compte c’est leur mise en œuvre qui bénéficiera aux citoyens », note Evelyne Tsagué.

Et d’ajouter : « lorsqu’elles sont bien gérées, les ressources naturelles peuvent être un moteur de croissance économique. Les gouvernements d’Afrique subsaharienne ont mis en place des fondations solides avec les lois qu’ils ont élaborées, mais cet examen de l’indice montre qu’ils doivent désormais se pencher avec plus d’attention sur leur application. »

Remarques à l’intention des rédacteurs :

 L’auteure principale du rapport, Kaisa Toroskainen, peut être sollicitée pour des interviews, en anglais et en français.

§  Selon l’Indice de gouvernance des ressources (www.resourcegovernanceindex.org) — une étude mondiale de la gouvernance des industries extractives dans 81 pays, publiée en 2017 — seuls deux pays d’Afrique subsaharienne obtiennent une note satisfaisante : le Ghana (pour le pétrole et le gaz, mais pas pour les minéraux), et le Botswana (minéraux). Cinq pays — le Zimbabwe, la RDC, la Guinée équatoriale, le Soudan et l’Érythrée — sont considérés comme en échec.

§  Le nouveau rapport publié par le Natural Resource Governance Institute étudie plus profondément les problématiques sous-jacentes à ce faible niveau de performance et évalue l’impact des « lacunes dans la mise en œuvre », en offrant des recommandations pour remédier à cette situation. Le rapport est disponible à l’adresse www.resourcegovernance.org/analysis-tools/publications/indice-de-gouvernance-des-ressources-naturelles-afrique-subsaharienne.

§  La moitié des pays de la région évalués par l’indice ont renouvelé ou modifié leurs lois depuis 2010, mais dans ceux où les réformes juridiques sont les plus récentes, la mise en œuvre des dispositions relatives à la transparence et à la responsabilité a pris le plus de retard.

§  Le tableau global indique que plus la dépendance d’un pays aux ressources est grande, moins sa performance en termes de gouvernance est bonne, les pays producteurs de pétrole et de gaz étant en moyenne légèrement plus tributaires et moins bien gouvernés que les pays producteurs de minéraux.

§  Cinquante-sept points (sur 100) séparent le pays le mieux et le moins bien noté sur l’indice (le secteur du pétrole et du gaz au Ghana et l’exploitation aurifère en Érythrée respectivement). C’est l’écart le plus important enregistré à l’échelle du globe.

§  Des cadres juridiques forts comprennent des dispositions relatives à la transparence et à la responsabilité : des règles en matière de divulgation des données sur le secteur extractif et la publication des contrats peuvent contribuer à la conclusion d’accords plus avantageux. Les exigences concernant la prise en compte des impacts locaux de l’exploitation peuvent potentiellement atténuer les effets négatifs et bénéficier au développement des communautés. Les cadres de gestion des recettes et les règles fiscales peuvent contribuer à une meilleure gestion des finances publiques dans les pays tributaires des prix des matières premières et de leurs fluctuations.

 

Pour plus d’informations, veuillez contacter :

Lee Bailey

Communications Director

Natural Resource Governance Institute

T +44 (0)20 7332 6114

M +44 (0)7823 442 954

lbailey@resourcegovernance.org

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