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Le pays où j’ai mal ! Cette déplorable Guinée (Par Tierno Monénembo) 

« La femme où j’ai mal » est le titre d’un mémorable recueil de poèmes écrit par le Camerounais, Paul Dakéyo. C’est avec plaisir que je parodie ici, cet homme que je place avec Senghor, Tchicaya U’Tamsi, Noël Ebony et Sony Labou Tansi au sommet du lyrisme continental.

Le pays où j’ai mal ! Ou plutôt, le pays où nous avons tous mal ! Cette déplorable Guinée qui, après nous avoir promis monts et merveilles n’en finit pas de nous montrer des vertes et des pas mûres ! Jusqu’à quand, saintes divinités africaines, cette interminable descente aux enfers ?

À voir l’état de nos routes, à visiter nos écoles et nos hôpitaux, à humer le climat malsain de nos liens sociaux, on se dit que ce pays n’est pas gouverné par des fils du pays mais par une armée d’occupation. Que de sang, que de fiel ! Que de bévues, que de coups tordus ! A force, notre classe dirigeante a fait de la sottise, sa vertu cardinale ! Une classe dirigeante bornée, cynique, sans idée et sans vision ! Une classe dirigeante qui prend sa primitive brutalité pour une force et ses sottises pour un titre de gloire !

Faites le tour de la région, vous ne verrez nulle part un Etat aussi embryonnaire. Je sais, les Etats africains sont loin d’’être parfaits. Mais au Mali, au Sénégal, au Burkina, en Côte d’Ivoire et ailleurs, il existe au moins un semblant d’Etat avec une administration avec des fonctionnaires payés au mérite. Chez nous, tout- même les grades de l’armée- s’obtient par le jeu du népotisme ou de la combine partisane. Cela se passe ainsi depuis 1958 et tous les signaux émis par le gouvernement indiquent que cela va empirer. Il y aura de moins en moins de travail, de moins en moins de nourriture ; de plus en plus de saletés et de maladies ; de plus en plus de détenus politiques, de plus en plus de manifestants fauchés par les forces de l’ordre.

Le disant, je m’incline devant la tombe de notre héros à tous, Roger Bamba. Je souhaite un bon rétablissement à Etienne Soropogui et à Madic 100 frontières. Je soutiens notre lion Oumar Sylla dit Foyinké Mengué dans sa légitime et très courageuse grève de la faim. J’exige comme la plupart de mes compatriotes l’arrêt immédiat des kidnappings et des arrestations arbitraires. À Ousmane Gaoual, à Ismaël Condé, à Chérif Bah, à Souleymane Condé, à Cellou Baldé et à tous les autres, je dis tenez bon, le peuple est à vous. Il est avec puisque c’est vous qui êtes du côté de l’honneur et du droit. Il vous soutient parce que c’est vous, ses porte-drapeaux, parce c’est vous, les boucliers de la patrie. C’est vous, la force, c’est vous, la beauté, c’est vous la lumière qui se prépare à dissiper les ténèbres de la dictature moribonde d’Alpha Condé !

Comme on le dit en Haïti, honneur et respect à vous tous !

Régime moribond, oui et justement d’autant dangereux que moribond. Ce système démoniaque sait qu’il n’en a plus pour longtemps. Alors, il va multiplier par cent les arrestations arbitraires, les assassinats, la division ethnique et le pillage de nos richesses minières. L’espoir est permis car volens nolens, nos luttes finiront par triompher. Mais en attendant, le fléau garde toute sa capacité de nuisance.

En ce début de nouvel an, un seul vœu, mon dieu : que je meure avant mon pays !

Par Tierno Monénembo, in Le Lynx

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