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Alpha Condé s’engage à promouvoir la transparence dans le secteur minier guinéen

A l’occasion de la fête nationale de la Guinée le 02 Octobre 2019 qui marque le 61e anniversaire de l’indépendance du pays, le Président de la République, Alpha Condé, a réaffirmé dans son adresse à la nation son engagement pour la transparence dans la gestion des revenus miniers destinés aux collectivités locales :

« Notre gouvernance est orientée vers la transformation de l’économie guinéenne, pour améliorer les conditions de vie de nos populations. C’est ainsi que nous avons décidé désormais de consacrer 15% des recettes minières au financement des collectivités locales à travers l’Agence Nationale de financement des collectivités- l’ANAFIC. Ce projet doté d’un budget de 700 milliards de francs guinéens, est destiné à impulser le développement dans ces régions minières. Ce programme s’exercera dans le respect des normes environnementales et de transparence dans le secteur minier. »

Dans l’extrait ci-dessus, le président exprime sa détermination à augmenter l’impact direct des revenus miniers sur les populations guinéennes, notamment rurales. Il apparait essentiel à cet effet que les transferts de revenus aux collectivités locales se déroulent dans le respect des dispositions du code minier de 2011 amendé en 2013 et de ses textes d’application. Le code minier a prévu, et à juste titre, en son article 165, que 15% de certaines taxes minières versées au Trésor Public soient allouées au Fonds National de Développement Local (FNDL) pour soutenir l’ensemble des collectivités locales du pays. Institué par la Loi de finances 2016, le FNDL est géré par l’ANAFIC, qui a, elle-même, été créée par décret présidentiel en novembre 2017. Précisons au passage que le prélèvement de 15% ne porte pas sur l’ensemble des recettes minières mais sur le montant des six taxes suivantes :

  • les droits fixes
  • la taxe sur l’extraction des substances minières autres que les métaux précieux
  • la taxe sur la production industrielle ou semi-industrielle des métaux précieux
  • la taxe sur les substances de carrières
  • la taxe à l’exportation sur les substances minières autres que sur les substances précieuses
  • la taxe à l’exportation sur la production artisanale d’or

Les droits de douanes, les différents impôts sur le revenu et le produit des participations de l’Etat ne sont pas concernés. Le montant de ces six taxes s’est élevé en 2017 à 1201,6 milliards GNF, d’après les données de l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives (ITIE), soit 26% des recettes minières. C’est 15% de ce montant, soit 180,2 milliards GNF (20 millions USD), qui alimente le FNDL, c’est-à-dire finalement 4% des recettes minières en 2017.

Il est à noter que la Loi de finances 2019 a prévu un budget d’affectation spéciale (BAS) de 518 milliards GNF pour abonder le FNDL. La Loi de finances rectificative du 4 septembre 2019 a ensuite fixé ce BAS/FNDL à 472 milliards GNF. Par ailleurs, un compte rendu du conseil d’administration de l’ANAFIC des 10 et 11 septembre 2019 révèle que 492 milliards GNF, qui représenteraient 95% du FNDL, ont déjà été distribués aux collectivités locales. Afin d’entretenir un climat de confiance entre les citoyens et les institutions au sujet de la gouvernance minière, il serait souhaitable que le gouvernement apporte des clarifications sur la source et l’affectation de ces revenus miniers, de sorte que le citoyen guinéen puisse vérifier par lui-même que ce qui est dû aux collectivités locales est effectivement reversé et est dépensé de manière appropriée.

NRGI souligne au précepte 2 de la charte des ressources naturelles les vertus de la transparence et de la redevabilité, et développe des propositions plus contextualisées dans le rapport sur les mécanismes d’appui au développement local dans la législation minière guinéenne publié en mai 2019. Il convient en effet d’assurer la transparence le long de la chaîne de décision tout entière et d’assurer l’application des règles, comme le prescrit le Président de la République. Dans cette perspective, l’ANAFIC, le Ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, le Ministère des Mines et de la Géologie, et le Ministère du Budget, pourraient :

  • Préciser le montant total du FNDL à verser en 2019 et sur les prochaines années en démontrant sa cohérence avec les fonds FNDL cumulés depuis plusieurs années.
  • Divulguer par un arrêté et sur les sites Internet des ministères et organismes concernés le Manuel de procédures du FNDL qui contient la clé de répartition aux différentes collectivités locales. Cet arrêté est prévu à l’article 6 de l’arrêté conjoint FNDL de juillet 2018.
  • Publier les montants FNDL à verser et ceux effectivement versés à chaque collectivité locale.
  • Demander aux collectivités de communiquer aux populations locales les montants du FNDL reçus et les projets élus ou éligibles pour ces financements.
  • Renforcer les règles de discipline budgétaire dans les collectivités locales, ainsi que les capacités des autorités communales et préfectorales, afin que les dépenses liées au FNDL améliorent effectivement les conditions de vie des populations guinéennes, y compris en zone rurale.

La mise en œuvre effective et transparente de ce transfert infranational FNDL pourrait améliorer significativement le score de la Guinée lors d’une prochaine mise à jour de l’Indice RGI de gouvernance des ressources naturelles.

 

Par  Hervé Lado , responsable pays pour Natural Resource Governance Institute (NRGI) en Guinée.

Et Thomas Lassourd , analyste économique senior chez NRGI.

 In resourcegovernance.org

 

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