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Affaire troisième mandat: Lettre d’un Guinéen inquiet à son Président

Monsieur le Président de la République de Guinée !

Au nom du peuple de Guinée !

Au nom de la jeunesse de Guinée !

Au nom des femmes et enfants de la Guinée !

Se rappelant de votre détermination pour l’instauration de la démocratie dans notre pays !

Conscient de la complexité de la situation sociopolitique de notre pays !

Sachant votre détermination à améliorer le quotidien de vos concitoyens !

Permettez-moi de m’adresser à vous très solennellement !

Excellence !

Nous sommes en passe de vivre un évènement politique qu’aucun Guinéen n’aurait imaginé si vous étiez élu Président de notre pays, il y a juste quelques années. Il s’agit bien de la probable modification de la constitution pour vous permettre de briguer un troisième mandat. Des velléités de mettre le compteur à zéro.

Personnellement, je n’y crois pas encore, que vous puissiez essayer, même un instant, de vous éterniser au pouvoir, de quelle que manière que ce soit.

Comme beaucoup de Guinéens, comme beaucoup de familles, j’ai souffert pour vous et pour l’instauration du multipartisme et de la démocratie dans notre pays. Ma famille a particulièrement souffert pour la même cause, ainsi que ma région et ma préfecture, Mandiana.

Vous avez posé des actes et vous continuez à œuvrer pour que notre pays aille de l’avant. Cela est perceptible à tous les niveaux. Malheureusement, le temps fait défaut pour l’achèvement de ces grands chantiers amorcés grâce à votre clairvoyance.

Deux mandats, dix ans. Peut-on dire que c’est peu, peut-on dire que c’est beaucoup. Mais, ne vous en faites pas, un chef ne meurt pas avec son pays ni avec tout son peuple. Nous sommes quand même plus de dix millions de Guinéens.

Moi je pense que c’est le fait d’avoir des hommes déterminés à mourir au pouvoir quel que soit le prix à payer, qui a fait de ce pays ce qu’il est aujourd’hui. On taille à sa mesure sa propre formation politique, ensuite on affaiblit les institutions du pays en nommant des béni-oui-oui.

Je ne voudrais pas être long, car je crois encore que, étant un démocrate comme Nelson Mandela, vous déjoueriez le complot que les ennemis du peuple, de notre pays, essayent de mettre en œuvre. La cinquième colonne. Ils veulent vous embarquer dans un bateau dont ils ignorent eux-mêmes la destination finale. À cause des intérêts personnels, on ne cesse de sacrifier la vie des Guinéens ! C’est cruel. On sait vraiment fabriquer de la dictature dans ce pays.

Quoiqu’il en soit, quelqu’un qui veut voler une mangue, si tu te presses pour dire « au voleur », il dira qu’il voulait simplement gratter sa tête. On est encore dans cette situation de veillée d’armes.

J’étais à l’institut Agronomique de Faranah, lorsque Fodé Soumah alias Ardjenne Fodé, faisait la campagne pour le référendum pour la modification de la constitution, en 2001. Je sais ce que cela m’a causé comme traumatisme, comme chagrin, à l’époque. Et de surcroît avec les mêmes slogans ou arguments politiques !

Il serait regrettable que l’histoire se répète encore. Qu’un autre Dadis surgisse un beau matin encore, pour ramasser le pouvoir à terre. Pourtant, c’est ce que les idiots préparent inconsciemment !

Ceux qui ont transformé le Général Conté en une silhouette, pendant qu’eux ils continuaient à sucer le pays durant des années, ce sont ceux-là qui vous entourent aujourd’hui.

  1. le Président, si vous avez effectivement l’intention de modifier la constitution pour briguer un autre mandat, alors sachez que vous êtes sur le point de trahir le peuple, peut-être inconsciemment ou indépendamment de votre volonté.

Si vous tombez dans ce piège de modification constitutionnelle, vous sortirez par la fenêtre de l’histoire de ce pays. On dira après vous, que celui qui s’est battu contre la dictature durant des décennies (un demi-siècle environ), est devenu dictateur à son tour. Et un dictateur meurt le plus souvent au pouvoir ou pour le pouvoir, précipitant son peuple et son pays dans l’incertitude.

Ci-dessous, quelques extraits de mon second ouvrage paru à L’Harmattan-Sénégal. Il constitue en quelque sorte ce que pense de la majorité silencieuse.

– « Étonnamment, ce sont ceux-là qu’il combattait inlassablement pour leur mauvaise gouvernance et qui le combattaient, férocement, pour ses belles idées de développement, durant des décennies, en tirant sur lui à boulets rouges, à chaque occasion, qui l’entourent aujourd’hui ! Il s’opposait à quoi alors durant ses décennies de lutte pour l’instauration du pluralisme ? » Extrait du roman intitulé : Kunfeko ou la fabuleuse histoire d’un natif de Dakana.

– « …S’il s’agit de modifier la constitution pour maintenir seulement que deux courants, pour basculer insidieusement dans le bipartisme, je suis pour. Même s’il faudra consacrer cinq ans pour palier à cette instabilité sociopolitique chronique, qui caractérise le pays depuis des décennies, une fois pour toute, je ne trouve pas cela quelque chose de mauvais. Mais s’il s’agit de la modifier, juste pour permettre à quelqu’un de mourir ou de s’éterniser au pouvoir, je suis contre. Lorsque quelque chose de couleur rouge tue ton papa, si tu vois une termitière rouge, tu auras peur… » Extrait du roman intitulé : Kunfeko ou la fabuleuse histoire d’un natif de Dakana.

On a simplement peur que vous ne soyez une effigie dans nos mains. La sénescence. La jeunesse de notre pays ne souhaiterait plus revivre le scenario du passé. On n’en veut pas !

Espérant une compréhension de mon inquiétude, je vous prie, Monsieur le Président, de donner un dernier coup K.O à ces ennemis de la nation. Des vrais apatrides. Des vrais traîtres. Au sens réel du terme.

 

Dr Mory Mandiana Diakité

Ingénieur agronome

Enseignant-chercheur-Écrivain

Email : pendamo@hotmail.fr

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